Pendant la période emo/sk8er/preppy des années 2000, tu crois que je m’habillais comment ? A ton avis, je portais une casquette Burberry ou un collier à clous ? Tu penses que ma grosse mèche sur le côté s’accompagnait d’un trait d’eye-liner noir, ou d’un sac Longchamp ?

Réponse…

Rien de tout ça! Dès le début de mon adolescence, j’ai aimé mélanger les styles pour n’appartenir à aucune case. Alors oui, j’ai porté des cravates comme Avril Lavigne mais le lendemain, j’arrivais à l’école avec une jupe plutôt bohème (vous voyez celles qui ont des pointes qui descendent là?) 🙈

Alors je dis pas que j’étais bien habillée, loin de là 😅 Les fautes des goûts, j’en ai déjà fait mais toujours le poing levé, t’as la ref? mais ce sentiment d’appartenance à une tribu, favorisé par le vêtement, c’est un truc que je n’ai jamais vraiment vécu.

Pourquoi je suis en train de lire un article où tu racontes ta vie et quel rapport avec ta marque ?

J’y viens 🙂

On est en 2025 et je n’entre toujours pas dans les cases. Si j’ai pas fait de starter pack, c’est parce que je suis contre cette utilisation de l’IA mais c’est aussi parce que j’arrive pas à me définir en quelques attributs. Je vois bien que les gens qui me connaissent pas ou peu pensent que je suis, au choix :

  • une fashionista qui scrute tous les défilés avec attention
  • une bobo écolo qui vit dans une yourte
  • une féministe woke qui boit des matchas

Désolée de vous décevoir mais je ne sais pas qui est à la tête de genre Dior, j’achète du dentifrice Colgate et j’ai goûté pour la première fois le matcha il y a une semaine, j’ai pas trop aimé. Et tant qu’on y est (parce que ça pourrait s’appliquer aux 3 clichés en même temps) je ne crois pas du tout en l’astrologie. Genre zéro. Me détestez pas svp 🫣

Je ne suis pas un cliché… et vous non plus !

Tout cet étalage biographique a pour but de vous dire une chose : je ne rentre pas dans les cases. Me dire que « j’appartiens » à telle ou telle communauté c’est difficile. En fait, je me sens à ma place nulle part. En manif, j’ai pas de groupe prédéterminé alors je reste avec les quelques personnes que je connais. Dans les événements plus mode auxquels je participe, je reste à l’écart parce que je comprends pas grand-chose aux conversations. Quand je shifte à mon supermarché coopératif, je me sens en décalage avec les client-e-s qui achètent des produits chers et sans goût, juste parce que c’est éthique.

En fait, les seuls moments où je me sens bien, c’est quand je suis dans des groupes hétéroclites. Mes ami-e-s, par exemple, sont assez différent-e-s pour me faire sentir acceptée. Mes sœurs sont tout aussi perdues que moi dans ces jeux d’appartenance, alors on se rejoint autour de ce côté awkward. Et si tu te retrouves dans ma marque, si tu lis ces lignes, il y a des chances pour que ce sentiment te soit familier.

Le rapport avec ma marque arrive dans ce paragraphe

Avant je les voyais à l’école, maintenant c’est sur les réseaux sociaux : les gens qui « belong » sont populaires. En correspondant à un « cliché », iels attirent les aspirant-e-s à ce cliché et donc, ça les renforce. Et ça, c’est exactement ce sur quoi une marque de vêtement essaie de jouer pour vendre. Les personnes qui m’ont conseillée par le passé me l’ont dit : il faut créer une communauté de personnes qui voient ta marque comme un état idéal à atteindre. Aujourd’hui, il leur manque quelque chose, il faut leur montrer que tu peux combler ce manque grâce à tes créations. En montrant que les personnes qui sont devenues « comme toi » sont heureuses. Prôner un mode de vie, un lifestyle, s’adresse à « la parisienne » ou « l’homme moderne » ou whatever.

Doit-on forcément rejouer encore et encore ce système de groupes, de « nous contre elleux », pour exister? Ou y a-t-il une autre voie?

Le moyen d’expression ultime

J’en ai déjà parlé mais pour moi, le vêtement, c’est avant tout un moyen d’expression. Tant qu’on pousse à acheter des best sellers, des clichés, des vêtements qui suivent tel ou tel code, on invite littéralement chacun-e à se positionner en termes de cases. J’ai le bon vêtement, je fais partie du groupe.

Alors bien sûr, il y a des moments où l’expression collective est importante. Quand on manifeste, quand on veut revendiquer quelque chose, ça aide de parler d’une même voix (et le vêtement peut contribuer à ça, par exemple en privilégiant certaines couleurs). Mais quid du reste du temps? Est-ce qu’on ne pourrait pas aussi apprendre à exprimer notre individualité? A casser les codes? A s’habiller non pas pour rentrer dans un moule, mais pour s’assurer qu’on est tout juste en décalage avec chaque moule pour que notre zone de confort soit l'espace qui se dessine en creux?

Genre imagine, si tous les cupcakes sont les moules, y a tout l'espace rose qui reste à inventer!

Bon, je vous l’accorde, tout ça est un peu confus. Je mélange mon vécu, mes connaissances en marketing et mes espoirs pour nourrir une réflexion qui n’en est qu’à ses débuts. Mais y a un truc que je sais : même si c’est le bordel dans ma pensée, y a des personnes qui comprennent. Des personnes qui, comme moi, se sentent en décalage par rapport à cette vision très sectaire du monde. Des personnes qui valorisent autant les points communs que les différences avec leurs proches, et qui, plutôt qu’un monde où tout le monde leur ressemble, aspirent à un monde où chacun-e-x est lea bienvenu-e, quel que soit son corps, quel que soit son genre. Quels que soient ses vêtements, quel que soit son style.

Je fais de l’impro mais je garde mes chaussures.

Je suis en couple depuis 13 ans mais j’ai pas d’enfants.

Je m’intéresse autant à l’IA qu’aux comédies musicales.

C’est ça, ne pas être un cliché. C’est accepter qu’on a des goûts, des envies, des habitudes qui ne correspondent à aucun moule. Bienvenue dans l’espace qui se dessine en creux, là où tout commence, là où on est définitivement inclassable !


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