2025 commence avec de gros changements sur les réseaux sociaux. Entre le Tiktok ban-déban aux USA et la nouvelle politique pseudo « liberté d’expression » de Meta, comme beaucoup d’entre vous, je commence à reconsidérer sérieusement mes canaux de communication. A une différence près : sans réseaux, ma marque meurt.

Entre militantisme et entrepreneuriat, c’est pas toujours facile de poser des choix. Alors dans cette article, j’ai eu envie de vous emmener dans mes réflexions, ma dissonance cognitive, mes questions toujours sans réponse… en espérant qu’en réfléchissant ensemble on arrivera à mieux !

Le monde a besoin d’esprit critique

Si je crée des vêtements non genrés sur mesure, c’est pas tellement parce que j’ai envie de faire des trucs jolis. C’est d’abord et avant tout parce que je veux remettre en question les certitudes sur lesquelles s’est construite l’industrie de la mode. C’est parce que je voudrais participer à une abrogation des systèmes de domination. Le vêtement, c’est pas l’objectif, c’est l’outil. C’est pas la fin, c’est le moyen. Plus précisément, c’est un moyen d’expression, à la fois pour moi et pour la personne qui le porte. Célébrer la diversité des corps, valoriser les spécificités de chaque personne, montrer qu’on a toustes le droit d’exister dans l’espace public, c’est critiquer les systèmes d’oppression. C’est politique. Le vêtement est politique. Le corps est politique. Tout est politique.

Et c’est là qu’intervient l’esprit critique justement. Parce que c’est en cultivant une diversité de points de vue, en confrontant notre vision des choses à d’autres, en apprenant chaque jour un peu plus qu’on ne sait rien et que la « vérité » qu’on appréhende est toujours partielle, plurielle et floue qu’on arrivera peut-être à s’en sortir. Pour être claire, s’en sortir ça veut dire ne pas sombrer dans une dystopie dictatoriale (qui est clairement le chemin que prend l’humanité actuellement : c’est tellement évident que c’en est presque caricatural).

L’esprit critique a besoin de vulgarisation

Tu viens peut-être de découvrir (avec le premier paragraphe de cet article) que derrière ma façade fun et colorée, je suis en fait une grosse intello. Et la vulgarisation, c’est exactement ça : faire passer des messages complexes en les simplifiant, en les rendant accessibles à un maximum de monde. C’est le tiktok qui dit exactement la même chose que mon article, mais en plus léger.

@assia.kara Quitter Insta, pour une petite marque qui en est ultra dépendante, ça peut pas se faire du jour au lendemain. Par contre, on peut tirer des leçons de ce qui arrive aujourd’hui et faire en sorte de moins dépendre de ces plateformes qui nous prouvent qu’elles n’ont que leur propre intérêt à l’œil et qu’elles sont prêtes à basculer dans le totalitarisme en 2 secondes si ça leur sert. De mon côté je commence sur Bluesky (qui d’ailleurs est en train de préparer un nouvel insta) et sur mastodon, donc rejoignez moi pour que je me sente moins seule 😅 #meta #insta #facebookads #bluesky #mastodon ♬ son original - assiakara

Ca veut pas dire « prendre les gens pour des débiles », attention. C’est surtout créer des portes d’entrée vers des sujets parfois rebutants et difficiles. C’est donner envie d’en savoir plus. C’est ce que l’école est censée faire mais que, faute de moyens (à cause de nos gouvernements qui décident de couper de plus en plus dans les budgets *vive la grève*) elle ne parvient plus à faire.

Alors à mon petit niveau, j’essaie de participer à cette vulgarisation. La vulgarisation n’est pas suffisante mais elle est nécessaire. Vous pouvez écrire tous les essais, recherches scientifiques ou analyses sociologiques qui vous voulez, sans vulgarisation, ils vont de facto rester la propriété d’un milieu bourgeois intellectuel qui est en position de domination culturelle. C’est (en vulgarisé) ce que nous explique Bourdieu quand il parle de reproduction sociale. Et spoiler alert : la reproduction sociale, c’est génial si tu veux finir dans la dystopie dictatoriale dont je parlais tout à l’heure.

Et en gros c’est ça, je pense, la raison principale pour laquelle on a besoin des réseaux sociaux. En tout cas, c’est principalement comme ça que je les utilise, en tant que créatrice de contenu et en tant que consommatrice d’autres contenus. Et ça, ça ne va pas s’arrêter.

Je rejoins pour le coup ce que Morgan Noam expliquait il y a quelques jours :

 

Et moi, j’ai besoin de … vendre

Alors si je ne créais que des contenus, mon article s’arrêterait là. Sauf qu’il se trouve que je crée aussi des choses bien matérielles : des fringues. Et ces fringues, pour pouvoir continuer à les créer, il faut les vendre. Et pour ça, j’ai aussi besoin des réseaux sociaux. Et là, ça devient plus délicat.

En tant que marque, si j’arrive à vendre des vêtements, c’est parce que petit à petit des gens me découvrent. Il y a bien sûr des techniques comme le bouche-à-oreille et la présence physique dans des magasins pour se faire repérer mais sorry, quand on ne vit pas à Paris et qu’on produit des choses à petite échelle (et sur mesure) c’est loin d’être le plus efficace. Actuellement, à peu près 90 % de ma clientèle est en France (et moi je suis en Belgique). Mais cette clientèle est également disséminée partout sur le territoire français, et donc pour tomber physiquement au bon endroit au bon moment pour être repérée par la personne qui se reconnaîtra dans ma marque, c’est un peu mission impossible.

C’est pour ça qu’aujourd’hui, les réseaux sociaux restent majoritairement le meilleur moyen de me découvrir. Alors avec le virage d’extrême droite que Meta est en train de prendre, je compare mes options :

  • quitter Facebook, Instagram et Threads, pour redémarrer de zéro sur Mastodon ?
  • continuer de jouer le jeu de Meta et faire comme si de rien n’était ?

L’option 1 est foireuse : ce serait jeter tout un travail de communauté que j’ai mis des années à construire et qui commence tout juste à porter ses fruits. Aller vendre des vêtements sur un réseau encore trop peu fréquenté, ce serait encore plus énergivore que de parcourir la France à la recherche de mes client-e-s potentielles.

L’option 2 est inenvisageable : je peux pas fermer les yeux et être aussi hypocrite que les marques que je dénonce à longueur de journée. Donner de l’argent à une entreprise qui met en place des mesures anti-esprit critique, non mais on est où ? Pour rappel, les vêtements c’est le moyen, et je ne sauvegarderai pas le moyen si c’est pour nuire à l’objectif.

Alors qu’est-ce qu’on fait ?

Ben… on galère.

Pour l’instant, je suis en plein questionnement sur l’avenir de mes réseaux. Les réseaux les plus décentralisés (et donc les moins « à risque » de vriller extrême droite) sont pas hyper tournés vers l’image. On est plus sur du texte court, de la dépêche, de la réaction. Et en même temps, ils pourraient très bien le devenir si les usages commencent à changer (je viens notamment d'apprendre que Bluesky travaillait à un remplaçant d'insta). Actuellement, je suis sur Bluesky et Mastodon et je découvre. Je poste peu, j’observe, j’essaie de trouver des inspirations. Si t’es sur l’un de ces réseaux, viens me faire coucou, je me sens très seule 😅

Une autre stratégie de beaucoup de personnes consiste à utiliser plus et mieux sa newsletter. De mon côté, j’envoie déjà pas mal de mails et je les trouve déjà pas si mal. Donc rassurez-vous j’ai pas l’intention de vous spammer. Après, peut-être que je devrais plus inciter les personnes à me suivre via newsletter, pour prévenir un hypothétique départ futur de Meta… Bref, si c’est pas encore le cas, hésite pas à t’abonner ici :

Et finalement, il y a déjà une décision que j’ai prise. En fait elle s’est imposée assez naturellement : tant qu’iels ne reviennent pas sur les dernières mesures, je ne donnerai plus un centime à Meta.

Oui car, en tant que marques, c’est nous qui finançons ces plateformes via la publicité.

Ma dernière campagne payante date de juin 2024. Ca fait des mois que je suis censée lancer des publicités sur mes salopettes. J’ai des rushes de vidéos pas encore montés, des listes de trucs à filmer, des notes avec des idées d’accroches… et ça fait des mois que je postpose, parce que pas le temps, parce que pas l’énergie.

Et dans quelques semaines, j’avais prévu de m’y remettre car je vais bientôt sortir une collection de salopettes-jupes (oui, les jupes sont interchangeables avec les pantalons des salopettes précédentes) et comme d’habitude, je voulais recruter de nouvelles personnes susceptibles d’acheter le produit. La collection reste, ce qui change, c’est la stratégie : bye bye la pub, on va tester l’organique et la viralité. Ca prendra certainement plus de temps. Si ça se trouve ça ne marchera pas. Mais au moins j’apprendrai plein de trucs. Et peut-être même que je vendrai quelques trucs ! Bref, je vais me faire confiance sur cette campagne et j’espère pouvoir vous faire un retour positif de tout ça !

Pssst : si toi aussi tu veux que j’aie un retour positif à partager, tu peux y contribuer directement ! Il te suffit… d’acheter les vêtements, tout simplement ! 😜 alors, je me débrouille comment en marketing sans pub ?

Commentaires

  • Camel:

    Salut,

    On niveau de la gouvernance, bluesky a les meme problèmes que X et ne serait pas aussi décentralisé.
    Quant à l’alternative d’instagram sur le fediverse, c’est pixelfed que tu peux ouvrir avec ton compte mastodon et le lié.

    Bon courage :)

    25 janvier, 2025

  • Camel:

    Salut,

    On niveau de la gouvernance, bluesky a les meme problèmes que X et ne serait pas aussi décentralisé.
    Quant à l’alternative d’instagram sur le fediverse, c’est pixelfed que tu peux ouvrir avec ton compte mastodon et le lié.

    Bon courage :)

    25 janvier, 2025

  • Mahé:

    Ton post est tellement intéressant, j’ai envie de me pencher sur la question, d’y réfléchir et voir ce qu’il est possible de faire et d’entreprendre à l’échelle d’une marque indépendante et engagée comme la tienne.

    25 janvier, 2025


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