Il y a quelques jours, j’ai publié ceci sur Instagram :
Et pour la première fois de ma vie, mon contenu est devenu carrément viral!
Des commentaires, des likes, des vues. Beaucoup de positif, de soutien, de partage d’expériences… mais aussi beaucoup de critiques et de remarques malaisantes. Et, sur cette publication ou sur n'importe quelle autre qui critique le patriarcat, les normes de beauté ou les discriminations sexistes c'est systématiquement la même rengaine de haters.
Je vous propose donc de passer en revue les 5 types de « rappels à l’ordre » les plus répandus dans les commentaires de ma vidéo. Je les ai classés du plus soft au plus virulent, comme ça, on va monter crescendo. J'espère te donner les 🗝️ pour qu'au terme des cette lecture tu puisse :
- les repérer
- les classer (dans mes 5 catégories ou dans d'autres, je suis loin d'être exhaustive!)
- et les déconstruire : pour ça, j'ai mis en gras dans chaque paragraphe ce qui se joue, ce qui me questionne et tire ma sonnette d'alarme.
Je 🤞 pour que cet article nous permette à toustes d'être mieux équipé-e-s face à la violence des haters du net!
NB : rassurez-vous, je vais bien, rien ne m’a blessée dans ces commentaires. Je suis super heureuse dans ma vie et quelques trolls ne vont pas réussir à gâcher ça. Par contre j’envoie tout mon soutien aux personnes qui, peut-être, vont moins bien que moi et qui se laissent atteindre par ces critiques. Egalement aux personnes qui reçoivent des messages plus haineux, plus virulents, plus menaçants : petit paragraphe là-dessus en fin d’article.
On s’en fout de ce que tu racontes
C’est la BASE : quand tu parles de féminisme, y a toujours quelqu’un pour te rappeler que tu ferais mieux de te concentrer sur les VRAIS problèmes.
Dans le cas de ma vidéo en particulier, c’est assez frappant la quantité de gens qui ont pris le temps de me dire que tout le monde s’en foutait de moi… Faut dire que c’était là toute l’ironie de la vidéo, mais bizarrement, le fait qu’elle aie suscité autant de commentaires du style, ça me requestionne : si tant de gens réagissent, ne serait-ce pas justement parce qu’iels ne s’en foutent pas tant que ça ?
Reviens dans le droit chemin
Il y a des personnes qui se la jouent bienveillantes même quand elles t’insultent 😆
Plus sérieusement, ce genre de commentaires est plus rare mais témoigne d’une grosse incompréhension du sujet. Ado, mes amies m’avaient déjà proposé un relooking et… j’avais déjà pété les plombs à l’époque.
Vouloir « m’aider » à être plus belle, ça reste une forme de violence, même si les intentions de la personnes ne sont pas de blesser. Tout d’abord parce que ça ramène toute ma valeur à mon physique, et puis parce que ça ramène tous nos physiques à un seul et unique standard de beauté, dans lequel on peut « nous aider à entrer ». Mais non merci, votre club pourri là, je n’ai pas envie d’en faire partie !
T’étonne pas si on ne veut pas de toi
Parce que le couple (hétéro) et les enfants sont le seul chemin vers le bonheur pour une femme, je serai malheureuse toute ma vie 🤷♀️
Ici, on entre dans des messages plus agressifs, ouvertement misogynes et frontaux dans leurs critiques. Parce que mes actes (ex : ne pas m’épiler) sortent de la norme dans laquelle on essaie de me faire entrer, c’est la répression. Et c’est bien la preuve que ce qu’on fait menace l’ordre établi 🙃
Et puis, on a la parade des double standards : ne pas s’épiler pour une fille devient l’équivalent de ne pas se laver pour un mec.
Les personnes non hétéro, non cis ou juste les meufs qui font « des boulots de mecs » prennent évidemment cette violence de plein fouet au quotidien, pour les mêmes raisons (mais exacerbées) : ne pas correspondre au « rôle » qu’une partie de la société veut nous obliger à endosser, c’est s’exposer à des insultes, parfois des menaces et même des actes physiques de répression. Dans l’actualité récente, c’est ce que vivent des personnalités publiques comme Antoine Delie ou Hoshi.
Arrête la propagande misandre
En rhétorique et en analyse de discours en général, c’est le classique argument de la pente glissante. Spoiler alert, c’est souvent un sophisme.
Comment passe-t-on d’une vidéo où je dis que je m’épile plus à mettre les gens en prison? Ici, on est clairement dans une parano, voire une campagne contrôlée de communication (la même personne répétant exactement les mêmes mots dans plusieurs commentaires). Comme souvent, c’est assez flagrant à quel point ce commentaire est le miroir de son auteur, lui-même en train de faire de la propagande anti-féminsite là où je disais juste que j’ai raté ma teinture.
Ce qui est flagrant, c’est le décalage entre la futilité de ma vidéo et la virulence des propos qu’on me prête.
« Patriarcat » : celui dont on ne doit pas prononcer le nom
Je n’avais encore jamais saisi le poids de cet mot. Tout comme parler de grossophobie entraîne des levers de boucliers façon « les minces aussi souffrent », parler de racisme appelle directement des fantasmes de « racisme anti-blanc », blâmer le patriarcat n’est, pour certain-e-s, pas audible.
On lit que ce n’est pas la faute du patriarcat puisque ce sont « les femmes les pires à critiquer le physique des autres ». Pour d’autres, le patriarcat n’existe tout simplement pas, c’est une invention des féministes woke pour chercher des problèmes là où il n’y en a pas.
Je suis la première à aimer le débat. Mais dans ce cas-ci, comment peut-on avoir une discussion intéressante avec des personnes qui refusent d’accepter l’existence de ce terme, sans être capable d’en donner une définition tout en devenant dingue dès qu’il est prononcé ?
Et encore, je fais partie de la norme
Je suis mince, j’ai un passing de blanche, je suis cis et hétéro. Traduction : je cumule pas mal de bons points dans cette société normée. Et oui, ça a un fameux impact sur les messages que je reçois et la façon dont je les reçois.
Tout d’abord, je jouis de pas mal de privilèges. Outre ceux cités plus hauts, j’ai un entourage qui m’aime, je suis en bonne santé et je m’éclate dans mon boulot et mes loisirs. Bref, au quotidien, je suis heureuse. Tous ces privilèges, j’en ai conscience, jouent un rôle fondamental sur le recul que je peux avoir sur ces critiques, sur le fait que je m’en amuse plus qu’autre chose. Si je n’étais pas comblée d’amour au quotidien, si j’étais sujette à la dépression ou si j’avais vécu un trauma, est-ce que j’aurais le luxe de me moquer des critiques? Je ne suis pas sûre.
Et puis aussi, les messages que je reçois, aussi haineux soient-ils sont ultra soft. Je n’ai pas reçu de menaces, je ne suis pas harcelée. Peut-être parce qu’avec tous mes privilèges, la société m’accorde un certain droit à m’exprimer. Mes idées dérangent, certes, mais mon existence est tolérée. Et ça, en termes d’insultes, je pense que ça fait toute la différence.
Comme expliqué en début d’article, j’envoie tout mon soutien aux personnes qui cumulent moins de privilèges que moi et qui, dans la même situation, reçoivent tellement plus de haine juste pour ce qu’elles sont. Un exemple ? Une personne grosse a soutenu mon propos en commentaire. Directement, les trolls l’ont invité-e à aller faire du sport. Plutôt que de discuter de son propos, iels ont discuté de son poids. Bref, dans notre société, moins tu as de privilèges, moins ce que tu dis importe. Et ça, croyez moi, on va se battre ensemble pour que ça change !
Commentaires
Audrey :
Merci pour ton article ! :)
17 septembre, 2023